A l’approche des législatives, l’’agitation de l’élite politique se fait sentir chaque jour davantage. Parmi l’élite, les titulaires de portefeuilles ministériels qui, pour entrer de plain-pied dans leur campagne électorale, vident tirent dernières cartouches. C’est le cas de la ministre de la santé, Yasmina Baddou qui vient de sceller une convention avec l’Instance centrale de prévention de la corruption (ICPC) pour le partenariat et la lutte contre la corruption. Cependant c’est fait déjà quatre que l’istiqlalienne Baddou déclarait à qui veut l’entendre :
« Je serais intransigeante dans la lutte contre la corruption dans les hôpitaux ». En avril 2008, la ministre de la santé affirmait encore qu’elle était « déterminée à aller jusqu’au bout pour rendre aux citoyens la confiance dans les hôpitaux». Au départ, les usagers des hôpitaux publics et centres de soins y ont cru un instant. Quatre ans après, ils se rendent compte qu’ils avaient mordu à l’hameçon et dégusté avec appétit un gros poisson d’avril que leur offrait Yasmina. Car pour le moment, ils n’ont rien vu venir hormis que le corps médical est resté bien accro du « sale » bakchich et des pots de vin ou en langage courant « kahwa », « baraka », « tadouira ».
Les grands connaisseurs des arcanes de l’échiquier politique marocains s’interrogent sur la pertinence du timing de la conclusion d’une pareille convention. Il semblerait qu’à l’instar de nombre de ses collègues au sein du gouvernement Abbes El Fassi, Yasmina Baddou qui est en train de vider ses dernières cartouches à blanc avant de céder son département à un nouveau locataire, cherche plutôt à redorer son blason pour entamer avec plus d’assurance sa campagne électorale.
Mais, son bilan parle de lui-même comme le démontre une étude socio-économique conduite pour le compte de l’ICPC, par le cabinet Mazars dans cinq grandes villes du royaume. L’étude qui se base sur un sondage d’opinions, atteste que 3 Marocains sur 10 recourent à la corruption et aux pots de vin pour bénéficier des prestations de soins. Selon les conclusions de cette étude, Casablanca et Rabat affichent les taux de corruption les plus élevés avec respectivement 33 et 32%. L’étude révèle aussi que le taux de corruption calculé sur la base des déclarations des citoyens dans les hôpitaux publics est de 32% contre 20% pour les centres de santé.
Au tout début de sa nomination la ministre de la santé s’est même alliée avec Transparency Maroc pour mettre en place un plan d’action national anti-corruption. Un Numéro vert a été crée, mais il n’a servi qu’à enregistrer les plaintes sans leur donner une suite et les conseils de discipline ont été réactivés mais avec peu de concret sur le terrain.
Les manifestations de la corruption demeurent selon cette étude, répandues au niveau de l’ensemble des spécialités et services de soins avec une forte concentration au niveau des services dits chauds, à savoir les urgences, l’accouchement et l’hospitalisation. L’admission et la planification-programmation des opérations chirurgicales semblent être les points où la vulnérabilité des victimes de la corruption est la plus importante avec des taux de corruption respectivement de 53 et de 43%. Selon les professionnels de santé, les montants des pots-de-vin sont à 75% inférieurs à 100 DH, avec une prépondérance des billets de 20 et 50 DH. Les petits pourboires (moins de 20 DH) sont plus répandus dans les centres de soins qui dans le milieu rural acceptent même les dons en nature.
Si le fléau de la corruption n’épargne aucun secteur, il est plus ressenti dans les secteurs sensibles en lien direct avec le public, conviennent nombre d’associations dédiées à la lutte contre ce maux social. C’est pour cette raison, que ces associations préconisent, que chaque titulaire d’un portefeuille ministériel ou d’un haut commis de l’état à la tête d’un établissement public, doit rendre des comptes à la fin de sa mission.
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