Le 1er juillet 2011 restera un jour historique pour le Maroc. Les électeurs se prononcent ce jour sur le projet d’une nouvelle Constitution, qui représente un véritable tournant pour le pays. Le nouveau texte promet en effet une reconfiguration de la donne politique. C’est pourquoi les regards sont braqués sur cette date. Car la Constitution issue du référendum du 1er juillet, si elle est adoptée, représentera un modèle authentique et une réponse subtile aux revendications de changement qui contrastent avec un environnement arabe tourmenté.
En l’espace de 50 ans, les marocains ont été consultés une demi-douzaine de fois sur la révision de la Constitution. Pourtant, jamais un texte constitutionnel n’a donné lieu à un débat aussi passionné entre partisans et pourfendeurs de la réforme. Le discours royal du 17 juin annonçant le référendum, avait ouvert la voie à une libération de la parole dans l’espace public sans précédent dans le pays. Depuis lors, une réelle pluralité de l’expression oppose des protagonistes défendant âprement des idées et avançant des arguments diamétralement opposés. On assiste à un débat sociétal antagoniste, mais autorégulé par un implicite code de conduite pacifique. Ce qui est devenu quasiment un luxe dans le contexte d’un « printemps arabe » en train de glisser imperturbablement vers le cauchemar. Au moment où, au Maroc, les revendications exprimées par la rue ont donné naissance à un échange contradictoire mais porteur d’espoir, elles ont tourné ailleurs, excepté les épisodes Tunisien et Egyptien, à la répression aveugle, à la guerre civile et au chaos.
Au Maroc, le débat s’était animé depuis déjà le 9 mars, lorsque le roi Mohammed VI a annoncé la refonte de la Constitution. Une refonte qui prend le sens d’une large séparation des pouvoirs et d’un meilleur rééquilibrage du rôle des institutions constitutionnelles. Si le Roi garde toujours un rôle central dans le nouveau texte constitutionnel, il concède une partie importante de ses prérogatives au chef du Gouvernement, qui sera désormais issu des élections directes. Le Parlement, le pouvoir judiciaire ont également vu leurs attributions renforcées, de même que le rôle des partis, syndicats et de la société civile.
Mais le débat ne s’est réellement enflammé qu’après l’annonce par le souverain, le 17 juin, de la présentation à référendum du projet de Constitution. En l’espace d’une semaine environ, les médias audiovisuels publics ont consacré plus de 120 heures aux émissions, débats et programmes d’information sur le projet de Constitution. Cela, sans tenir compte des interventions des partis politiques et des syndicats, aussi bien de la majorité que de l’opposition, et même des partis non représentés au parlement. Surtout, les médias électroniques et les réseaux sociaux sur Internet ont fonctionné à plein régime. Des deux côtés, partisans de la nouvelle Constitution et adversaires, ces derniers rassemblés dans le Mouvement du 20 février, ont battu le pavé à de nombreuses reprises. Ils ont rassemblé des manifestants par milliers, voire des centaines de milliers. Mais la principale image qui a marqué les esprits, c’est le caractère pacifique des manifestations. A part de rares dérapages, les manifestants des deux bords, tout comme les forces de l’ordre, ont fait preuve d’une tempérance reconnue par tous. Un esprit de retenue reflétant une tolérance non feinte qui est à l’œuvre dans la société, en dépit de toutes les divergences.