De ce premier ministre que l’on disait trop vieux dès sa nomination par Mohammed VI en 2007, l’histoire du Maroc ne retiendra probablement pas grand-chose, bien qu’un examen objectif de son bilan gouvernemental ne prête pas véritablement à rougir. Depuis la réforme constitutionnelle, l’on retrouve même un Abbas El Fassi plus combatif que jamais, résolu à mener son parti à la bataille électorale et à vendre chèrement sa peau. C’est à travers l’éditorial du journal « Al Alam », organe de presse du parti de l’Istiqlal, que le premier signal de la deuxième vie de « Si Abbas » s’est manifesté il ya quelques mois, à travers un ton de plus en plus militant et visant systématiquement la nouvelle bête noire du parti : le Parti Authenticité et Modernité (PAM), créé par Fouad Ali El Himma. Selon plusieurs informations concordantes recueillies le milieu de la presse écrite, la liberté de ton retrouvée d’ « Al Alam » aurait même fait bondir les ventes du quotidien de près de 30% en quelques mois, et « Si Abbas » superviserait lui-même la rédaction des éditoriaux, désignant les cibles à abattre. Autre élément de rupture dans le comportement de Abbas El Fassi ces derniers mois, son attitude de plus en plus ferme à l’encontre des ministres « indisciplinés », que le désormais Président du conseil de gouvernement a recadré à plusieurs reprises, leur enjoignant de ne pas faire de déclarations qui engagent l’ensemble du gouvernement, sous peine de se faire désavouer publiquement. Au niveau interne de l’Istiqlal, Abbas El Fassi a pris soin de verrouiller le processus de nomination de son successeur, en plaçant ses hommes clefs à toutes les encablures stratégiques, et en refusant que ne se tienne un congrès avant les législatives. Ainsi, Abbas souhaite s’assurer une porte de sortie « honorable », puisque son successeur ne sera connu qu’après le scrutin, et sera donc de facto obligé de faire allégeance au vieux leader s’il veut prendre sa place. En cela, Abbas El Fassi s’est inspiré des méthodes de son mentor, M’hamed Boucetta, qui, bien qu’affichant près de 90 printemps, continue à peser et à influencer les décisions au sein du parti nationaliste. Pour El Fassi, après avoir été la cible des critiques et la bête noire de la presse lors de son mandat, il resté également un dernier combat à mener afin de « boucler la boucle » : mettre en place le régime d’indemnisation des chômeurs, théorisé par son gendre Nizar Baraka , et qui se heurtait a des barrières budgétaires et techniques. Ce programme d’indemnisation, qui serait géré par la CNSS et prévoit jusqu’à 70% du dernier salaire pour les chômeurs, a été annoncé et devrait être déployé sous peu, sonnant comme un ultime pied de nez aux détracteurs de Abbas El Fassi avant que ce dernier ne tire sa révérence.