Elections: les partis effarouchés par la charte d’Aboudrar ?

Nombreux sont les dirigeants des partis politiques qui ont été littéralement effarouchés par certaines propositions de la charte éthique présentée par Abdeslam Aboudrar, le président de l’ICPC (Instance Centrale de Prévention de la Corruption) . Pourtant l’Instance  n’a fait qu’avancer des règles pour la moralisation de la vie politique auxquelles, en principe, tous adhèrent volontiers.En tête de ces propositions, le bannissement du nomadisme électoral, qui s’apparente plutôt à du vagabondage politique. Cette pratique a tellement discrédité l’acte politique et la pratique partisane aux yeux des électeurs qu’il serait aberrant de ne pas la combattre ouvertement. Retirer le mandat électoral à l’élu qui aurait changé de camp politique pendant sa députation ne devrait pas poser beaucoup de problèmes. De la même manière, l’utilisation de l’argent ou le recours aux moyens publics lors des campagnes électorales et l’intervention des autorités, ne peuvent plus être tolérés.

Néanmoins, plusieurs responsables des 26 partis politiques qui ont participé à la journée sur la transparence de la vie politique, ont trouvé à redire aux propositions de l’ICPC. Il s’agit, certes, de réserves portant sur la procédure suivie dans l’élaboration de la charte éthique, mais derrière ces excuses « techniques », beaucoup voient dans les atermoiements des partis une volonté de faire perdurer le système habituel lors des élections. en effet, es plus récalcitrants ont avancé comme excuse qu’ils préfèrent une concertation préalablement à la production du texte critiqué. Mais, une telle minutie est-elle appropriée alors qu’on n’est plus qu’à quelques petites semaines de la date du 25 novembre ? La réussite d’élections législatives emblématiques de la nouvelle étape politique, sous la Constitution de juillet, saurait-elle s’accommoder de dérobades et de faux-fuyants ?Le président de l’ICPC l’a souligné, visiblement excédé par la petitesse des politiciens marocains, qui ne pratiquent pas ce qu’ils prêchent. En effet,la lutte pour la transparence et contre la corruption tend essentiellement à moraliser la vie publique, dont les partis politiques sont un acteur incontournable. Dans ce sens, le rôle des partis dans l’encadrement des citoyens et la préparation de nouvelles générations rompues à la gestion de la chose publique ont été fortement soulignés par l’article 11 de la nouvelle Constitution. Aussi, est-on en droit  d’espérer que l’ajournement de la signature de la charte ne soit qu’un report technique de courte durée.

Le cas échéant, le citoyen serait en droit de mettre en pratique sa charte éthique « personnelle », en refusant de manière massive de reconduire certains députés notoirement corrompus et en favorisant, autant que possible, le renouvellement de ses élus, en mettant l’accent sur la jeunesse et la féminisation. Ce n’est qu’à travers une plus grande pluralité de l’offre, ainsi que son rajeunissement et l’octroi de la place qu’elles méritent aux femmes, qu’il sera possible de faire entrer un peu de vertu au sein d’un parlement largement décrié.