En cette période de « soldes » sur les programmes électoraux, où les idées le plus folles sont avancées par les politiciens marocains, il est des propositions qu’il convient absolument de décortiquer, car elles pourraient séduire l’électeur-chaland en quête de projet proposé par un parti politique. Parmi elles, la mesure-hautement symbolique- avancée par le parti islamiste, le PJD, de relever le SMIC de 2300 DH à 3000 DH, soit une augmentation de près de 31%. Dans n’importe quelle démocratie, ce type de mesure serait reléguée au rang de proposition « de témoignage », souvent formulée par un parti d’extrême gauche. Or, au Maroc, cette « proposition » de relever le smic à 3000 DH est sérieusement débattue, alors même qu’il est clair qu’elle contribuerait à détruire-immédiatement- la compétitivité du Maroc, notamment dans des secteurs très exposés tels que le textile. Bien entendu, il ne faut pas ici raisonner en valeur absolue mais en termes relatifs, car chaque marocain souhaite que le SMIC puisse évoluer de manière substantielle, assurant une meilleure subsistance pour les couches sociales les plus défavorisées. Cependant, en n’ajoutant que 150DH par mois, soit une augmentation de 6,5%, le Maroc se retrouverait au même niveau de SMIC que la….Russie, créant pour lui même un désavantage compétitif d’envergure avec ce pays bien positionné pour rafler les commandes européennes. En outre, en faisant la promotion de ce type de mesures, le PJD fait ici la démonstration de son irresponsabilité économique, qu’il sacrifie sur l’autel de ses ambitions politiques, sans se soucier un seul instant de l’effet que ce type d’annonces aura sur l’électeur lorsque le SMIC ne sera pas augmenté de 31%. Disons-le sans ambages et sans prendre de risques, même si le PJD venait à prendre la tête du futur gouvernement, il n’aurait pas les moyens MATERIELS de tenir ce type de promesses, malgré l’énergie avec laquelle Abdelilah Benkirane en fait l’article. Or, il faut également constater que les adversaires du PJD, et notamment la coalition du G8, n’a pas eu le courage politique d’affronter le parti islamiste sur cette question, par peur que les électeurs pensent que l’alliance serait contre le relèvement des minimas sociaux.
C’est là une erreur d’appréciation de l’intelligence de l’électorat, car les marocains sont tout à fait capables de comprendre que le véritable enjeu n’est pas d’obtenir des mesures de court-terme qui fragiliseront le moyen et le long terme, mais d’obtenir des réformes de fond qui, même si elles seront en partie douloureuses, sont seules à même de construire le socle sur lequel se construit le développement véritable. En réalité, les électeurs marocains aimeraient entendre leur classe politique leur dire comment elle compte agir pour faire évoluer en priorité le salaire MOYEN (et non le SMIC), et surtout comment s’organisera une meilleure répartition des richesses. Tels sont les véritables enjeux qui sont, pour l’instant, absents des débats électoraux.
Enfin, comment faire confiance au PJD alors même qu’il vient de balayer la « différence » qu’il revendiquait avec force en s’insinuant dans le chemin très classique de la démagogie électorale, prônant des mesures que n’importe quel économiste rejetterait sans même y accorder un regard. Il faut néanmoins reconnaître au programme économique du PJD une qualité : il force les autres partis à se déterminer en termes de doctrine économique, mettant le pôle libéral face à ses responsabilités en termes de cohérence de ses propositions .
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