Après le Mali, les demandes adressées au Maroc par la Tunisie, la Libye et la Guinée pour les accompagner dans la gestion du champ religieux ne passent pas inaperçues. La formation d’imams et de prédicateurs est en train de devenir une spécialité que le Maroc partage volontiers avec des pays proches par l’héritage religieux et spirituel.
Si le Maroc est de plus en plus sollicité, c’est que le modèle marocain de gestion des affaires de culte s’impose comme une référence. Il s’agit d’une reconnaissance pour la pratique sereine de l’islam au Maroc dans un contexte régional marqué par la montée de l’extrémisme religieux. Ces dérives religieuses sont alimentées par la profusion de prédicateurs autoproclamés, voire de charlatans et d’imposteurs qui occupent certaines chaînes satellitaires, des mosquées de quartiers, ou se font connaître à travers les CD, etc. Et au nom de l’islam, ils distillent aux nombreux fidèles crédules leur lecture rigoriste, sectaire même, du message charitable et tolérant de l’islam véritable.
Dans ce consensus sur la réussite du modèle suivi au Maroc en matière de gestion du religieux, se trouve une institution centrale : C’est celle d’Amir Al Mouminine, le Commandeur des croyants. En plus de son rôle stabilisateur, cette instance de l’islam des origines a réussi à faire barrage à l’infiltration au Maroc des courants religieux extrémistes et takfiristes qui enflamment une grande partie du monde musulman. Aujourd’hui, de plus en plus d’autorités religieuses musulmanes attribuent le désordre politique, les guerres et l’insécurité qui secouent une partie de l’Orient arabe aux extrémismes religieux qui y foisonnent. Il n’y a qu’à regarder le chaos dans lequel s’enfoncent de grands pays comme l’Irak, la Syrie ou l’Egypte.
A présent, le fait que la Tunisie cherche à s’imprégner du modèle de gestion religieuse marocain est d’autant plus révélateur que le courant religieux conduit par Ennahda est lui-même très fort. Mais, le mouvement de Rached Ghannouchi est assez mature pour reconnaître que s’il porte un projet politique pour la Tunisie, il n’en a pas en matière de gestion du champ religieux. Rien d’étonnant donc que le pragmatisme tunisien continue toujours de surprendre les autres pays arabes.