Lors d’un entretien accordé au quotidien l’économiste, le président de la commission consultative de révision de la constitution, Abdellatif Menouni, s’est exprimé pour la première fois sur les conditions d’élaboration de la constitution. Occasion pour lui de revenir sur la méthodologie participative de la commission, associant partis politiques, syndicats et société civile. Selon Abdellatif Menouni « le travail produit s’inscrit dans le cadre du discours royal et répond aux aspirations des formations politiques ». La méthodologie employée pour l’élaboration de la nouvelle constitution, marque un point de rupture avec les anciennes révisions constitutionnelles.Certes si la commission est, avant toute chose, une commission technique, elle n’en demeure pas moins politique. En effet, le discours royal du 9 mars a été explicite sur ce point en invitant la commission à faire preuve d’audace et d’aller au-delà des grandes lignes prescrites dans celui-ci. Autrement dit, il apparaissait, dès le départ que la réforme de la constitution allait en réalité se traduire par l’élaboration d’une nouvelle constitution.De plus, un travail à huis clos, que certains n’ont pas manqué de critiquer, a été totalement exclu. La commission a consacré plus d’un mois à enregistrer les propositions émises par les partis, les syndicats, les organisations non gouvernementales et les groupements de jeunes dont le mouvement du 20 février. Echanges, débats et concertations ont ainsi été de mise.Des changements ont même été opérés entre la version remise au roi à Oujda et la version soumise à référendum. Ces changements résultant essentiellement des divergences de points de vue entre la commission et le mécanisme politique de suivi, composé de l’ensemble des formations politiques et des centrales syndicales les plus représentatives.Par ailleurs, au-delà de la méthodologie, « Nous sommes en vérité face à une architecture institutionnelle tout à fait différente », estime Abdelatif Menouni. La nouvelle constitution introduit un changement du schéma institutionnel. Et ce, à plusieurs niveaux : restructuration des pouvoirs de façon à voir émerger des pouvoirs indépendants et séparés, élargissement du domaine de compétence du législatif, notamment à travers l’évaluation des politiques publiques, et définition de nouveaux moyens institutionnels en faveur de l’exécutif qui se voit doté de pouvoirs réels et précis. Autre nouveauté, probablement la moins anodine, l’élaboration d’une véritable charte des droits et libertés.Ceci étant, le principal enjeu pour la nouvelle constitution est que celle-ci s’appuie sur une élite politique qui soit sur la même longueur d’onde avec les changements, y compris de mentalités, qu’elle introduit. Cela nécessitera probablement du temps, mais devrait permettre, du moins à terme, une régénérescence des politiques. « La relation constitutionnalisée entre l’exercice des responsabilités et la reddition des comptes devrait frayer la voie à un jeu politique plus ouvert, moins maîtrisé, comportant des incertitudes et donc la compétition entre les partis et forces politiques. Ces acteurs seront encouragés à former les militants, à choisir les meilleurs, à viser l’efficacité, à s’assigner en plus des objectifs, des résultats », Abdelatif Menouni.