Le Roi Mohammed VI a prononcé vendredi un discours devant les membres des deux Chambres du Parlement à l’occasion de l’ouverture de la première session de la nouvelle année législative, dans lequel il a notamment appelé le système bancaire à simplifier et faciliter les procédures d’accès au crédit, à s’ouvrir davantage aux autoentrepreneurs et à financer les petites et moyennes entreprises.
Voici le texte intégral du discours prononcé par le Souverain à l’occasion de l’ouverture de cette première session de la 4ème année législative de la 10-ème législature :
“Louange à Dieu, Prière et salut sur le Prophète, Sa famille et Ses compagnons,
Mesdames et Messieurs les honorables parlementaires,
Nous sommes heureux de présider l’ouverture de la quatrième année de la présente législature. C’est, pour Nous, l’occasion de vous rencontrer de nouveau, vous les représentants élus de la Nation.
Du fait qu’elle intervient au milieu du mandat parlementaire en cours, cette année législative doit être marquée du sceau de la responsabilité et du sérieux.
Elle a, par ailleurs, la particularité d’être éloignée du temps des élections, généralement ponctué de tensions.
Il vous appartient, donc, de saisir cette conjoncture favorable pour vous acquitter au mieux de la mission dont les citoyens vous ont investis. Votre devoir est aussi d’agir dans un esprit d’émulation constructive afin de servir leurs intérêts, défendre les Causes nationales.
Vous devez aussi aborder cette année législative dans la perspective de l’étape nouvelle dont Nous avons esquissé les contours lors du dernier Discours du Trône.
Si Notre souci a été de définir les défis essentiels ainsi que les enjeux économiques et développementaux majeurs de cette étape, la responsabilité de la classe politique, plus particulièrement celle du gouvernement, du parlement, des partis politiques, est de réunir les conditions favorables à son aboutissement.
Mesdames, Messieurs, les honorables parlementaires,
L’étape, qui s’amorce dès à présent, requiert une implication unanime, fondée sur une confiance redoublée, une volonté ferme d’œuvrer dans un esprit de collaboration et d’unité, une mobilisation vigilante ; elle doit aussi se caractériser par le souci de transcender les vaines querelles et d’enrayer toute perte de temps et d’énergie.
Ses chantiers prioritaires sont l’opérationnalisation des réformes, le suivi des décisions, la réalisation des projets.
Ils relèvent au premier chef des appareils exécutif et législatif.
Ils sont également du ressort du secteur privé, en particulier sur le plan du financement. Mention doit aussi être faite du rôle clé des organisations sérieuses de la société civile.
De fait, il incombe au gouvernement de mettre au point des plans rigoureux sur la base desquels les décisions et les projets, de portée nationale, régionale ou locale, pourront être soigneusement conçus, minutieusement réalisés et suivis sur le long terme.
Par ailleurs, grâce au concours de l’Administration placée sous son autorité, le gouvernement doit veiller à l’exécution efficace des décisions, en mettant en place les ressources adéquates, plus particulièrement les données statistiques, les mécanismes d’inspection et de contrôle. Il doit aussi veiller à ce que les différents intervenants œuvrent dans un esprit de transparence, de collaboration, d’harmonie.
A cet égard, en matière de responsabilité, aucune dérobade n’est possible dans le cadre d’une stricte application du principe de reddition des comptes.
En vertu de la Constitution, le Parlement se voit, lui, investi de larges attributions en matière de production législative, de contrôle de l’action gouvernementale, d’évaluation des politiques publiques.
En tant que parlementaires, vous êtes donc responsables de la qualité des lois qui encadrent la mise en œuvre effective des projets et des décisions, afin que l’action entreprise reflète bien les dynamiques à l’œuvre au sein de la société, et qu’elle réponde aux attentes et aux préoccupations des citoyens.
Il vous appartient également de suivre l’action du gouvernement en termes de gestion des affaires publiques, tous domaines confondus et de veiller scrupuleusement à son adéquation avec les préoccupations réelles des citoyens.
Mesdames, Messieurs, les honorables parlementaires,
Les décisions prises, si justes soient-elles, les projets programmés, si rigoureux soient-ils, dépendent, pour leur exécution, de la disponibilité de financements suffisants.
C’est pourquoi J’ai toujours insisté sur la nécessité d’une bonne préparation des programmes et des projets, d’une prise en charge spécifique des questions de financement, d’apurement de l’assiette foncière.
En la matière, il est de notoriété publique que les efforts de l’Etat ne suffisent pas, et que, par conséquent, l’implication du secteur privé dans le processus de développement est indispensable.
Nous faisons notamment allusion au secteur bancaire et financier, qui constitue, pour Nous, la clé de voûte de toute stratégie de développement.
L’opérationnalisation et l’accompagnement des projets et des décisions vont au-delà de la conclusion formelle de contrats et la signature d’accords. Ces opérations supposent également un contrat moral, puisant aux deux sources de la Raison et de la Conscience.
De ce fait, les différents acteurs assument une responsabilité partagée, chaque partie ayant l’obligation d’honorer ses engagements, de remplir ses devoirs.
Dans ce contrat, sont ainsi impliqués non seulement les institutions de l’Etat et les élus, mais aussi le secteur privé, plus particulièrement les organismes de financement, le secteur bancaire.
Le Maroc, Dieu soit loué, dispose d’un secteur bancaire alliant robustesse, dynamisme et professionnalisme ; autant d’atouts qui lui permettent de soutenir la résilience et le développement de l’économie nationale.
Par ailleurs, le système financier marocain fait l’objet d’un contrôle rigoureux de la part d’institutions nationales indépendantes, hautement qualifiées.
Aussi la crédibilité du secteur bancaire, la confiance dont il jouit s’en trouvent-elles renforcées, à l’échelle nationale comme à l’extérieur.
Son niveau d’évolution lui a permis d’investir dans nombre de pays étrangers, notamment en Afrique.
Pourtant, certaines catégories de la population, qui le considèrent comme un organisme ne recherchant qu’un profit immédiat et sans risque, en ont une perception négative.
Cette représentation est justifiée par des faits, tels que le difficile accès des jeunes entrepreneurs au crédit, le faible accompagnement des diplômés et des petites et moyennes entreprises lors de leur création.
Je mesure parfaitement combien il est malaisé de faire évoluer certaines mentalités dans le secteur bancaire. Dans le même ordre d’idées, j’ai déjà souligné la nécessité de changer les mentalités au sein de l’Administration, pour mettre fin à des comportements préjudiciables au développement et à l’investissement.
Aussi exhortons-Nous le secteur bancaire national à un engagement plus ferme, à une implication positive plus vigoureuse dans la dynamique de développement que connaît notre pays.
Cet effort doit porter spécifiquement sur le financement de l’investissement, l’appui aux activités productives, pourvoyeuses d’emplois et génératrices de revenus.
A cet égard, outre l’engagement des banques auprès des grandes entreprises en termes d’appui et de financement, Nous les incitions à s’acquitter de la mission prépondérante qui leur échoit en matière de développement.
Pour cela, elles doivent notamment simplifier et faciliter les procédures d’accès au crédit, s’ouvrir davantage aux autoentrepreneurs, financer les petites et moyennes entreprises.
A cet effet, Nous invitons le gouvernement et Bank Al-Maghrib, en coordination avec le groupement professionnel des banques du Maroc, à œuvrer à la mise au point d’un programme spécial d’appui aux jeunes diplômés, de financement des projets d’auto-emploi.
Eu égard à leurs retombées positives sur nombre de familles et sur l’ensemble de la société, il convient de s’inspirer des expériences fructueusement menées par les organismes qui financent des projets portés par des jeunes, facilitant ainsi leur insertion socioprofessionnelle.
Notre souhait est que ce plan, dont Je suivrai les différentes phases avec le gouvernement et le reste des parties prenantes, s’articule autour des axes suivants :
Premièrement : favoriser l’accès, aux crédits bancaires, du plus grand nombre de jeunes qualifiés, porteurs de projets et issus des différentes catégories sociales, pour leur permettre de s’engager dans l’entreprenariat et de bénéficier des meilleures chances de réussite.
Deuxièmement : soutenir les petites et moyennes entreprises spécialisées dans les activités d’exportation, notamment vers l’Afrique, et leur permettre de capter une partie de la valeur ajoutée générée au profit de l’économie nationale.
Troisièmement : faciliter l’accès aux prestations bancaires et aux opportunités d’insertion professionnelle et économique, à l’ensemble des citoyens, en général et aux travailleurs du secteur informel, en particulier.
Nul besoin de rappeler que le dynamisme économique passe par le développement des transactions bancaires.
A cet égard, Je tiens à saluer les résultats obtenus au cours des deux dernières décennies, qui ont vu tripler le taux de bancarisation de la population marocaine.
Dans ces conditions, en mettant à profit les technologies nouvelles et les innovations financières, il convient que les banques redoublent d’efforts pour élargir la proportion des Marocains qui recourent aux prestations bancaires et aux dispositifs de financement. Les deux parties pourront ainsi en tirer avantage dans une logique d’équilibre et d’équité, qui profite in fine au processus de développement.
Ce plan n’atteindra pas ses objectifs si les citoyens bénéficiaires ne s’impliquent pas de manière responsable et ne respectent pas les engagements induits par les prêts contractés.
Par ailleurs, il appartient aux institutions et aux autorités de régulation et de contrôle financiers d’assurer le suivi des différentes opérations, de veiller à instaurer une relation équilibrée, fondée sur la confiance entre organismes de financement et débiteurs.
A cette occasion, Je rappelle la responsabilité sociale qui incombe à l’entreprise financière, ainsi que sa nécessaire participation aux initiatives constructives, qu’elles soient à vocation sociale ou humanitaire, ou qu’elles visent la préservation de l’environnement, la promotion du développement durable.
Mesdames, Messieurs, les honorables parlementaires,
La construction d’un Maroc évolué et développé, la formulation de réponses appropriées aux préoccupations et aux attentes de ses citoyens, nécessitent la mutualisation et la mise en cohérence des efforts.
De cette tribune, J’invite l’institution législative que vous représentez, l’appareil exécutif, ainsi que le secteur privé, plus particulièrement le secteur bancaire, à s’associer à l’effort de développement national, à contribuer à la réussite de l’étape nouvelle dans laquelle nous nous engageons.
Soyez, que Dieu vous garde, à la hauteur de cette étape qui requiert un sens élevé des responsabilités, un engagement fort, la volonté ferme de faire prévaloir l’intérêt supérieur de la Nation, pour que soient assurés la prospérité du pays et le bien-être de sa population.
Dieu a dit : « Ô vous qui avez la foi ! Obéissez à Dieu, obéissez au Messager, et ne rendez pas vaines vos œuvres ». Véridique est la parole de Dieu.
Wassalamou alaykoum warahmatou Allah wabarakatouh”.
(avec MAP)