Le chercheur et spécialiste du Maghreb, Kader Abderrahim, a pointé, jeudi, « le retour d’un régime de la peur » en Algérie, noyée dans la déception après le vent d’espoir qu’avait soulevé le mouvement du Hirak, violemment réprimé par le système.
Dans un entretien à la radio du Vatican, à l’occasion du 4ème anniversaire du mouvement de contestation populaire pacifiste du Hirak, l’auteur du livre « Géopolitique de l’Algérie » a affirmé que les “Algériens n’ont malheureusement pas été entendus de la part de ceux qui tiennent les règnes du pays, alors que leurs revendications étaient à la fois réalistes et modestes”.
“A ce jour, tous ceux qui pensent d’une manière libre en Algérie sont systématiquement pourchassés, écartés, voire emprisonnés”, s’est indigné le maître de conférences à Sciences Po, évoquant, dans ce sens, le sort de plusieurs chercheurs universitaires, intellectuels et journalistes.
Selon lui, “il n’y a plus de presse dans un pays qui s’enorgueillissait de la liberté de ses publications. Tous les acquis ont été remisés au placard pour une durée indéterminée et les prisons sont déjà pleines”, soulignant l’échec d’une transition démocratique malgré les rassemblements pacifiques et populaires de près de 13 millions d’algériens tous les vendredis pendant environ trois ans dans l’ensemble du pays.
Depuis l’avortement de cet espoir, “la société s’est repliée sur elle-même, ce qui empêche l’Algérie à entrer collectivement dans la modernité et à relever les défis sociaux, économiques et politiques”, a fait observer le spécialiste.
‘’Comment envisager une alternative crédible pour les Algériens dans ces conditions ?’’ s’interroge Kader Abderrahim, estimant que le processus sera “certainement très compliqué et prendra énormément de temps”.
Interrogé sur les relations entre Alger et certains pays européens dans le sillage de la crise énergétique due notamment au conflit en Ukraine, l’expert a assuré que “l’Algérie, n’ayant pas modernisé ses outils techniques d’hydrocarbure, est loin d’avoir les moyens de se substituer à la Russie en matière d’approvisionnement en gaz”.
Même ses ressources sont “limitées”, a-t-il ajouté, notant que l’Algérie “n’a, en outre, pas de perspective d’avenir, car le pouvoir sait qu’il n’a pas de légitimité et que tout peut s’arrêter brutalement, violemment et rapidement”.
“Tel est son grand problème, qui s’ajoute à l’obsession majeure, voire unique, de ceux qui sont aux manettes, dont la seule préoccupation est la pérennité du système politique tel qu’il existe”, a conclu l’universitaire.