L’atmosphère politique à Ottawa a viré ces derniers jours. Mardi, à l’issue d’un Conseil des ministres, Mark Carney a confirmé ce que de nombreux économistes anticipaient : l’éclatement d’un conflit commercial entre le Canada et les États-Unis paraît désormais inéluctable.
«Il est très improbable que nous parvenions à un accord exempt de droits de douane», a concédé le Premier ministre, marquant une rupture avec la retenue affichée jusqu’alors.
La veille, le président américain, Donald Trump avait notifié officiellement à Ottawa l’instauration, dès le 1er août, de tarifs douaniers de 35 % sur plusieurs produits canadiens notamment le bois d’œuvre, l’aluminium et les produits agricoles. Les secteurs les plus exportateurs sont ainsi en première ligne de cette guéguerre commerciale entre les deux voisins nord-américains. Le locataire de la Maison-Blanche a déjà exclu toute perspective de renégociation en affirmant que «ces lettres constituent notre accord final. Le choix est sans appel : plier ou subir une escalade tarifaire».
Dans l’ombre, le gouvernement fédéral d’Ottawa affine sa riposte et plusieurs scénarios sont à l’étude : surtaxes ciblées sur les importations agricoles américaines, restrictions sur certains équipements médicaux ou quotas sur les produits transformés. Aucune décision n’a encore été arrêtée.
La donne se complique avec les dernières statistiques économiques selon lesquelles, en juin, l’inflation au Canada a rebondi à 1,9 %, tirée par la hausse des prix des véhicules neufs, des meubles et des vêtements, tandis que le recul des coûts de l’essence s’atténue.
L’inflation sous-jacente, elle, se maintient au-dessus de 3 %, écartant toute perspective d’assouplissement monétaire. La Banque du Canada, qui se réunira le 30 juillet, devrait maintenir son taux directeur à 2,75 %, contrairement aux attentes des marchés financiers.
Cette double-pression commerciale et monétaire, suscite l’inquiétude des entreprises canadiennes. Avec plus de 70 % de ses exportations destinées aux États-Unis, le Canada redoute un choc immédiat sur sa croissance économique, l’emploi et l’investissement.
Le Conseil canadien des affaires réclame des mesures de soutien urgentes pour les industries vulnérables. En Ontario et en Colombie-Britannique, les autorités locales anticipent déjà des perturbations dans les chaînes d’approvisionnement.
En parallèle, Ottawa tente de diversifier ses partenariats économiques à l’international et prévoit en ce sens, une mission diplomatique en Asie, avec pour objectif de renforcer les liens avec l’Indonésie, la Corée du Sud et le Japon. Mais ces ouvertures ne compenseront pas, à court terme, une rupture avec les Etats-Unis, premier partenaire commercial du Canada.