L’UE propose un prêt à Kiev garanti par les avoirs russes gelés

Plus de trois ans après le début de l’invasion russe, l’Ukraine fait face à une crise budgétaire d’une ampleur inédite. Selon les projections du Fonds monétaire international (FMI), le pays devra combler un déficit de 65 milliards de dollars au cours des deux prochaines années, conséquence directe d’un effort militaire qui absorbe désormais près des deux tiers d’un budget déjà exsangue. Les dépenses sociales essentielles — retraites, salaires du secteur public — reposent aujourd’hui largement sur l’aide occidentale.

Depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, Washington, principal bailleur de Kiev sous Joe Biden, n’a alloué aucun nouveau financement, plaçant l’Europe au premier rang des soutiens financiers et militaires. La Commission européenne s’est engagée à mobiliser jusqu’à 100 milliards d’euros, mais ces fonds ne seront disponibles qu’à partir du budget européen 2028. D’ici là, les Vingt-Sept cherchent une solution permettant de maintenir leur soutien, tandis que quelque 300 milliards de dollars d’avoirs russes restent gelés dans des institutions financières européennes et internationales.

Face aux divisions internes sur une éventuelle saisie de ces avoirs, la Commission étudie un mécanisme alternatif : un « prêt de réparation », permettant d’accorder environ 140 milliards d’euros à l’Ukraine sans confisquer directement les actifs gelés. Euroclear, basé à Bruxelles et dépositaire d’environ 185 milliards d’euros d’avoirs russes, serait tenu de fournir un prêt équivalent. Kiev ne serait pas tenue de rembourser avant l’obtention d’éventuelles réparations de Moscou.

Mais ce montage divise. Euroclear, soutenue par la Belgique, craint des représailles russes et des procédures juridiques potentielles, et redoute que ses clients délaissent les marchés européens. Plusieurs États membres soulignent également que, si la Russie refusait tout dédommagement, l’Union serait collectivement responsable du remboursement.

À cela s’ajoute la pression américaine : le plan de paix en 28 points défendu par Donald Trump prévoit de mobiliser 100 milliards de dollars d’actifs russes pour la reconstruction menée par Washington, en échange de 50 % des bénéfices générés.

Selon plusieurs experts, l’incapacité de l’Europe à sécuriser un financement durable pour Kiev pourrait devenir un « désastre stratégique », alors que l’Ukraine, fragilisée, ne peut se permettre un arrêt de l’aide internationale.