Le gouvernement a surpris tout le monde en annonçant sans préavis l’accélération de la décompensation des hydrocarbures. La décision était certes dans l’air, mais la brusque mise en marche de la machine risque de provoquer une levée de boucliers générale, y compris dans le propre camp de Benkirane.
Le calendrier prévoit la suppression totale de la compensation étatique sur le fuel industriel et l’essence à partir du 16 février. Pour le gasoil, la réalité des prix entrera en vigueur à partir de la mi-avril. Mais, elle se fera partiellement et par étapes, vu le fort impact social de toute augmentation du prix du gasoil à la pompe. Le chef du gouvernement doit en tout cas s’attendre à une opposition farouche. D’ores et déjà, les professionnels sont montés au créneau. La Fédération nationale du transport routier a tiré la sonnette d’alarme sur une décision qui risque de fragiliser le secteur. Les transporteurs de voyageurs sont d’autant plus alarmés qu’ils ne peuvent pas répercuter automatiquement une éventuelle hausse à la pompe sur le prix du ticket.
Pour le transport de marchandises, la marge est plus grande. C’est le consommateur final qui paie les augmentations de prix arbitraires, particulièrement dans le segment des fruits et légumes. Quant aux chefs d’entreprises, ils craignent un impact négatif sur les industries. Dans un secteur où le prix de l’énergie compte pour un quart du coût de certains produits, les entreprises ont de quoi s’inquiéter pour leur compétitivité.
Pour autant, Abdelilah Benkirane continue d’argumenter qu’aucun autre gouvernement n’a eu le courage de toucher à une caisse de compensation devenue dangereusement budgétivore et qui risquait d’hypothéquer les équilibres financiers du pays. Des arguments qui sont loin de convaincre le simple citoyen, pas plus d’ailleurs que la base électorale du PJD. Des voix au sein du propre parti du Chef de gouvernement redoutent déjà que la formation islamique essuie les répercussions de cette décision aux premières échéances électorales.