Il y a un an, Abdelilah Benkirane était nommé chef de gouvernement après la victoire de son parti aux élections du 25 novembre. Des élections qui faisaient suite à l’adoption de la Constitution du 1er juillet, laquelle accorde au chef du gouvernement des pouvoirs sans précédent. Mais s’il est encore trop tôt pour évaluer tout le mandat du cabinet islamiste, ce laps de temps est néanmoins suffisant pour apprécier l’efficacité de gestion et, surtout, la capacité du gouvernement Benkirane à appliquer son programme électoral.
Une chose est certaine, la première désillusion pour Benkirane et son équipe est en bonne partie due à la conjoncture économique difficile. A cause de la crise, les promesses du PJD d’atteindre une croissance de 7% ont été réduites pratiquement à néant. C’est à peine si les prévisions pour 2012 atteignent les 3%. Un chiffre d’autant plus décevant qu’il est aggravé par un inquiétant déficit public de plus de 6%. Sans parler du chômage persistant des jeunes et des énormes attentes en matière de formation, de santé, etc. Quant aux réformes promises en matière de gouvernance, de moralisation de la vie publique et de lutte contre l’économie de rente, le bilan est mitigé. Le gouvernement a essuyé de vives critiques sur sa gestion hésitante des agréments accordés, contre toute logique économique dans les secteurs du transport routier, de l’exploitation des carrières de sable, … L’initiative du ministre du transport et de l’équipement de se limiter à publier la liste des bénéficiaires a ainsi été considérée comme un banal déballage de noms sans aucune suite concrète. L’autre grand chantier en attente concerne la réforme de la Caisse de compensation. Un mécanisme correctif censé maintenir les produits de base à la portée des plus démunis, mais qui s’est transformé en un véritable gouffre pour les finances de l’Etat. Pourtant, en introduisant une impopulaire certes, mais indispensable augmentation des prix de l’essence et du gasoil, le gouvernement Benkirane a dressé contre lui de larges couches sociales, en premier lieu les professionnels et les syndicats du transport public.
Côté politique, Benkirane a du souci à se faire pour sa coalition gouvernementale. Hamid Chabat, le remuant chef de l’Istiqlal et son principal allié, ne cesse de faire pression pour un remaniement ministériel. Le chef du gouvernement se voit concurrencer sur son propre terrain, son partenaire istiqlalien rivalisant dans le discours réformateur, voire populiste. Et la pression de Chabat est telle que les questions fusent sur le degré de cohésion qui subsiste dans le cabinet Benkirane. De là à ce que le doute sur la capacité de l’actuelle coalition à tenir jusqu’à son terme, en 2016, il n’y a qu’un pas que de nombreux observateurs n’hésitent pas à franchir.