Les Etats-Unis qui ont des intérêts géostratégiques et sécuritaires au Maghreb et au Sahel, font preuve d’une grande délicatesse dans leurs rapports bilatéraux avec chacun des deux frères «ennemis», le Maroc et l’Algérie.
C’est dans ce contexte que le Secrétaire d’Etat américain, John Kerry a entamé mercredi soir sa première tournée maghrébine à Alger, avant de s’envoler dans la soirée de jeudi en direction de Rabat.
A Alger comme à Rabat, le chef de la diplomatie américaine a coprésidé avec ses homologues algérien, Ramtane Lamamra et marocain, Salaheddine Mezouar, les travaux d’une nouvelle session du dialogue stratégique des Etats-Unis avec les deux pays.
La mission de Kerry est perçue par les observateurs, comme étant délicate dans la mesure où les rapports entre le Maroc et l’Algérie évoluent depuis longtemps, sur fond d’une tension alimentée par la fermeture des frontières terrestres depuis 1994 et surtout par le vieux dossier du conflit du Sahara Occidental au sujet duquel les positions des deux pays sont pratiquement inconciliables. Malgré les médiations étrangères et l’assouplissement par Rabat de ses positions initiales, en proposant une large autonomie pour la zone contestée, le pouvoir algérien n’a pas changé d’un iota sa position, appelant à la faveur du Polisario, à l’organisation d’un référendum d’autodétermination.
Pour préserver ses propres intérêts géostratégiques, sécuritaires et économiques dans la région, Washington, tout en ayant attribué au Maroc le statut d’allié stratégique majeur hors OTAN, fait tout pour ne pas froisser son partenaire algérien.
Le Maroc est également privilégié au plan économique par l’accord de libre-échange qui le lie depuis 2006 aux Etats-Unis et qui a permis aux deux pays de quadrupler en 2012, la valeur de leurs échanges commerciaux à 4 milliards USD.
Pour le Maroc, la visite de Kerry revêt un intérêt particulier, dans la mesure où elle intervient à moins de deux semaines du renouvellement par le conseil de sécurité de l’ONU du mandat de la MINURSO au Sahara occidental.
Pour rappel, à la même date de l’année dernière, le Maroc avait été vivement contrarié par le projet de résolution américain visant l’élargissement du mandat de la mission onusienne aux droits de l’Homme. Ce projet a fini par être annulé par la Maison Blanche.
Ainsi, commente un diplomate basé à Rabat, si sur le plan économique, social et culturel, la coopération des Etats-Unis tant avec le Maroc qu’avec l’Algérie, ne présente pas de difficultés majeures, en revanche sur le plan politique, diplomatique et militaire, cette coopération comporte de gros risques de malentendus.
Pour préserver ses intérêts, Washington doit ménager la chèvre et le chou en faisant preuve d’une grande délicatesse dans ses rapports avec chacun de ses deux partenaires maghrébins pour éviter le pire.