Mustapha Khalfi a ouvert la boîte de Pandore, mais ne sait visiblement plus comment la refermer. Le ministre de la communication est épinglé sur sa volonté d’imposer une vision à sens unique, voire carrément islamiste, au travail des télévisions publiques.
Les nouveaux cahiers de charges imposés aux télévisions publiques, particulièrement à la chaîne à grande audience 2M, risque de provoquer un véritable chamboulement dans leurs programmes. Les professionnels estiment même que le ministre outrepasse ses prérogatives, en essayant de dicter des cahiers de charges qui ne sont en fait que des grilles de programmes déguisées. D’ores et déjà, la coalition gouvernementale est secouée par les ondes provoquées par la décision du ministre de la communication. Des membres PPS du cabinet Benkirane ont ainsi ouvertement critiqué l’initiative « unilatérale » du ministre islamiste. Cette nouvelle poussée de fièvre met de nouveau à l’épreuve la cohésion d’une coalition incertaine, qui vient à peine de franchir ses 100 jours aux commandes. Le dirigeant du Parti du Progrès et du Socialisme a, peut-être même, franchi le Rubicon en menaçant de se retirer du gouvernement islamiste si ce dernier devait remettre en cause les acquis en matière de libertés publiques et individuelles.
Mais à quelque chose malheur est bon. L’énorme polémique suscitée par la démarche du ministre de la communication aura eu le mérite de clarifier au moins deux choses : D’abord que les téléspectateurs marocains ne sont pas tous indifférents à ce qui leur est servi sur les chaînes publiques, contrairement aux prédictions assurant que la télévision publique est irrémédiablement boudée par les marocains. Ensuite, que de nombreux téléspectateurs tiennent fermement à conserver à l’audiovisuel public, et particulièrement à la chaîne 2M, sa diversité et son cachet pluriel. Une identité cathodique qui se recoupe finalement avec le tempérament ouvert et tolérant du citoyen lambda. En fait, la réaction collective à Mustapha Khalfi est à la mesure de l’initiative controversée du ministre. Alors qu’il était attendu sur une réforme nécessaire dans le sens de l’amélioration et de la modernisation de l’audiovisuel, le nouveau ministre vient imposer une conception idéologique qui risque d’enfoncer la télévision publique.