Sommes-nous assez protégés contre la criminalité et la délinquance au Maroc ?

Dire que la situation sécuritaire demeure globalement normale et satisfaisante sur l’ensemble du territoire national, c’est sincèrement prendre les choses à la légère. Le citoyen lambda sait qu’il ne se sent pas totalement en sécurité quand il descend seul ou avec ses enfants dans la rue, quand il se trouve au milieu de la foule, dans les terrains de football et parfois même chez soi aussi bien dans les quartiers populaires que dans les quartiers huppés des grandes villes. L’absence de statistiques scientifiquement fiables et crédibles, nous interdit de tirer des conclusions dans ce cas de figure, ou de faire des constats pouvant s’avérer superficiels ou carrément faux. Quand le ministre de l’Intérieur, Mohand Laenser sort de son cocon, pour déclarer aux élus de la Nation, que « la situation sécuritaire demeure normale et satisfaisante sur l’ensemble du territoire national, comme en témoignent tous les observateurs neutres ». Le citoyen ordinaire aimerait bien savoir de quels observateurs s’agit-il ? Probablement Laenser fait-il allusion à ces étrangers (touristes, responsables et hommes d’affaires) qui font une petite escale au Maroc en empruntant un circuit évidemment bien sécurisé.
Quand le ministre prend pour témoins, les opérateurs économiques nationaux et les investisseurs étrangers pour évoquer le sentiment de satisfaction, le citoyen ne voit nulle part où est le rapport de la sécurité des capitaux de ces derniers avec la sécurité des citoyens et de leurs biens. En réalité, quand un citoyen est agressé ou se trouve en situation de danger, et qu’il appelle au secours sans être entendu et sauvé à temps, il est doublement victime d’abord de son agresseur et ensuite de l’Etat qui a failli à son devoir de protéger les citoyens et leurs biens. Les médias nationaux étalent chaque jour sur leurs colonnes, d’innombrables cas de délinquance et de criminalité atroces qui dépassent l’imaginaire.
Le ministre a avancé que 500.000 cas ont été traités en 2011, par les services de la sûreté nationale et de la gendarmerie Royale avec un taux d’élucidation de 85% dans des délais très courts. Déjà ce chiffre est énorme, en plus, le ministre ne donne aucune idée sur les milliers de cas non dénoncés ou passés sous silence. De surcroît, nos statistiques sont peu ou pas du tout fiables, tant qu’elles n’émanent pas d’organismes neutres et spécialisés et restent de l’exclusivité du ministère de l’Intérieur, de la Direction générale de la sécurité nationale (DGSN) ou de la gendarmerie Royale. Le Maroc est d’ailleurs classé parmi les pays, où les données concernant la criminalité se font rarissimes, ou sont souvent dosées à la source pour des considérations et des objectifs spécifiques.
N’empêche que dans son rapport pour l’année 2011, la DGSN nous révèle que les crimes qui engendrent le sentiment d’insécurité sont clairement en baisse et c’est tant mieux pour peu que cela soit vrai. Au cours de la même année la Direction de la sécurité nationale a recensé 19.222 cas dans cette même catégorie (vol qualifié, vol à l’arrachée, vol de voitures, enlèvement, viol et attentat à la pudeur). La DGSN précise que les crimes violents ne représentent plus que 11,43% du taux général de la criminalité apparente, pourtant ces chiffres risquent de créer chez le citoyen, le sentiment d’horripilation. Un numéro vert, la spontanéité, la rapidité de l’action des services sécuritaires et une large répartition géographique des éléments d’interventions feraient sûrement baisser et à court terme, le taux de la criminalité sans avoir besoin d’une rallonge budgétaire.