Exodus : la censure, un bon coup de pub

Georges Clemenceau a dit un jour : « la guerre est une chose trop grave pour être confiée à des militaires ». Une formule qui s’adapte à de nombreux politiques lorsqu’ils décident de choses culturelles, comme ce qui vient de se passer avec l’interdiction du film Exodus.

exodusDifficile de ne pas voir dans cette décision inconsidérée la main des islamistes dans le gouvernement. La décision de censure est tombée à la dernière minute, et le nouveau patron du Centre Cinématographique Marocain n’a visiblement pas opposé de résistance à la pression du ministère de la communication.

Quoi qu’il en soit, cette déplorable décision est incompréhensible pour plusieurs raisons. D’abord, le temps des interdictions est révolu. Pour toujours. Dans le contexte de la suprématie de l’internet et des réseaux sociaux, l’interdiction d’un film ou de toute autre production culturelle ne signifie pas qu’ils ne toucheront pas le public. Au contraire, la censure est devenue paradoxalement un puissant vecteur de publicité.

Le public marocain qui le souhaite cherchera à regarder le dernier péplum de Ridely Scott par les innombrables moyens virtuels qui existent. L’actualité regorge d’exemples où la controverse suscitée par l’interdiction d’idées ou de productions, a provoqué des succès inespérés pour ces mêmes produits.

L’autre raison tient à l’inanité de la lecture superficielle des œuvres de fiction, en essayant de les mettre en concurrence avec le credo des textes sacrés. Chacun des deux domaines a son champ propre dans lequel il agit et étend son influence.

Enfin, l’interdiction s’inscrit à contre-courant des efforts pour répercuter la diversité et la tolérance de la société marocaine. Une diversité qui, entre autres, permet au Maroc de se tenir à bonne distance du fanatisme et du sectarisme qui déchirent le monde arabe.

Comble de l’incohérence, cette censure intervient alors qu’une partie d’Exodus a été tournée au Maroc. Quelle crédibilité auront dorénavant les studios de Ouarzazate, où sont tournés chaque année plusieurs superproductions, si le pays d’accueil n’a que mépris pour les œuvres du cinéma mondial ?