Sous l’interrogation angoissée «L’Algérie s’effondre: Entraînera-t-elle la France dans sa chute?», l’ancien ambassadeur de France à Alger, à deux reprises entre 2008 et 2020, Xavier Driencourt, décrit un «un système militaire (formé, on l’oublie, aux méthodes de l’ex-URSS), brutal, tapi dans l’ombre d’un pouvoir civil, sans doute autant affairiste que celui qu’il a chassé».
Dans une tribune publiée par le quotidien Le Figaro, le diplomate français qui connaît bien l’Algérie pour y avoir été ambassadeur entre 2008 et 2012, puis entre 2017 et 2020, parle d’un régime «obsédé par le maintien de ses privilèges et de sa rente, indifférent aux difficultés du peuple algérien».
Pour Xavier Driencourt, l’Algérie sous la junte ressemble à une vaste prison où sont enfermés «non seulement les politiques, fonctionnaires et militaires liés à l’ancien régime –et auxquels l’Armée nationale populaire doit son statut actuel–, mais aussi les journalistes qui ont eu le tort d’écrire des articles hostiles ou réservés sur le régime, et ceux qui, naïvement, ont posté sur les réseaux sociaux un jugement ou une opinion dissidente».
Le diplomate pointe l’aveuglement de Paris qui, dit-il, ferme «les yeux sur la réalité algérienne», et fait mine de croire «que le pouvoir algérien est légitime à défaut d’être démocratique, que le discours antifrançais est un mal nécessaire, mais transitoire, que la démocratie est un apprentissage qui prend du temps».
Les conséquences pour la France sont inévitables, car «l’Algérie va mal, beaucoup plus mal que les observateurs ou les rares journalistes autorisés le pensent», estime l’ancien ambassadeur, pour qui 45 millions d’Algériens «n’ont qu’une obsession: partir et fuir», dans le seul pays où «chaque Algérien a de la famille», la France.
Leur objectif est d’échapper à un pays ravagé par «le choix désastreux de 1962, la crise économique, la corruption née de la rente pétrolière, le découragement non seulement des élites des grandes villes du Nord, mais aussi du peuple des campagnes et de l’Algérie profonde».
Pour Xavier Driencourt, «peu de gens resteront en Algérie», et déjà les conséquences se profilent en France avec, pour prix de son aveuglement et de ses compromissions, «l’immigration massive, sans rapport avec ce qu’elle est aujourd’hui, islamisme conquérant, ghettoïsation de nos banlieues, repentance mémorielle».
«S’il fallait résumer brièvement et brutalement la situation, je dirais que l’+Algérie nouvelle+, selon la formule en vogue à Alger, est en train de s’effondrer sous nos yeux», écrit Xavier Driencourt, dans une allusion à peine voilée, à la gestion totalitaire du président Abdelmadjid Tebboune et du chef d’État major de l’armée, Saïd Chengriha.
Le diplomate conclut avec cette terrible interrogation: «l’Algérie s’effondre, mais risque d’entraîner Paris dans sa chute. La IVe République est morte à Alger, la Ve succombera-t-elle à cause d’Alger?».