C’est dans une ambiance tendue que les instances dirigeantes du mouvement du 20 Février se sont réunies durant le week-end, afin de définir la ligne à tenir suite à l’adoption par référendum de la nouvelle constitution à une écrasante majorité de 98%. Le 20 Février, qui avait appelé à boycotter le scrutin, s’est retrouvé dans une situation compliquée après que le taux de participation ait dépassé les 72% ; déjouant ainsi les pronostics et réussissant presque à doubler le score de 2007, qui avait été d’un modeste 37%. Malgré ce score sans équivoque, le mouvement a appelé à manifester dimanche 3 Juillet, et plusieurs milliers de personnes avaient semble-t-il répondu présent à l’appel de la coalition née sur Internet. Comment expliquer cette mobilisation, alors même que le référendum avait tous les atours du plébiscite ? En premier lieu, il faut rappeler que le noyau dur du 20 Février est composé de partis d’extrême gauche, dont Annahj Addimocrati et le Parti Socialiste Unifié, qui ont une longue tradition de manifestations, disposant d’une base militante certes réduite mais ultra- disciplinée (tradition marxiste oblige), et qui se rend donc facilement visible. Autre élément plus inquiétant, les journalistes de l’agence française AFP ont constaté un retour des militants islamistes d’Al Adl Wal Ihssane sur le pavé aux côtés des jeunes du 20 février, ce qui fait craindre à l’émergence d’un front anti-constitution qui se radicaliserait au cours des semaines à venir, constituant ainsi le pire scénario envisageable, les deux extrêmes de l’échiquier politique étant tous deux capables de se livrer à des actes de violence pour faire entendre leurs revendication . D’un autre côté, des voix au sein du mouvement du 20 février commencent à se faire entendre pur demander à ce que le groupe se constitue en parti politique afin d’ « assumer ses responsabilités » lors des prochaines élections législatives qui devraient se dérouler à l’automne. Un scénario qui affole les partis politiques traditionnels, qui voient d’un très mauvais œil cette irruption possible sur une scène politique marocaine déjà très morcelée. En effet, le mouvement du 20 février viendrait affaiblir encore plus la gauche marocaine, et notamment l’USFP, qui est déjà en proie à des luttes intestines qui confèrent au roman-feuilleton brésilien. Ainsi, certains leaders de l’USFP n’arrêtent pas de faire les yeux doux aux chefs du 20 février afin qu’ils rejoignent le parti. Un scénario pour l’instant inenvisageable par le mouvement du 20 Février, qui tiendrait à son indépendance, refusant que quiconque leur vole leur « révolution ». Selon nos informations, les réunions des instances dirigeants du mouvement du 20 février se sont succédé tout le week-end, sans qu’une position commune n’aie pu être arrêtée.