Encore un de ces arbitrages de dernière minute dont Benkirane a le secret, mais qui ne font qu’ajouter à la confusion. La décision du gouvernement d’augmenter le SMIG de 10% à la veille du 1er mai, a ainsi opposé salariés et chefs d’entreprises, sans satisfaire ni les uns ni les autres.
Les arguments avancés par les deux camps sont imparables. Face à la détérioration constante du pouvoir d’achat des salariés et petits fonctionnaires, les opérateurs économiques opposent l’érosion de la compétitivité des entreprises. Bien sûr, l’augmentation de 10% a été répartie en deux, l’une à compter du 1er juillet 2014 et la seconde une année plus tard. Mais la CGEM, la Confédération générale des entreprises du Maroc, garde un œil inquiet sur le coût du travail. Le patronat assure que le niveau du SMIG au Maroc est bien supérieur à celui en vigueur dans d’autres pays concurrents de la région, comme en Turquie.
Le dernier classement de la compétitivité établi par le World Economic Forum (WEF) place le Maroc au 77ème rang mondial. Pis encore, la CGEM attire l’attention sur les risques de pousser de nombreuses unités industrielles ou commerciales à passer à l’informel. Pour la CGEM, cette augmentation s’inscrit même en opposition avec les objectifs de la stratégie de relance industrielle 2014-2020, présentée il y a à peine quelques semaines. Ceci, au moment où le tissu industriel marocain qui compte quelque 1,2 million de salariés, se rétrécit constamment.
De l’autre côté, l’augmentation de 10% du SMIG est loin de satisfaire les salariés dont les revenus sont, sans cesse, grignotés par la cherté de la vie. Cela n’a pas non plus affaibli leur mobilisation. Les slogans arborés ce 1er mai sont révélateurs des exigences des centrales syndicales en termes d’amélioration du pouvoir d’achat et de protection des droits des travailleurs. Des voix s’élèvent pour demander l’indexation du SMIG sur le taux d’inflation. Mais là encore, le retour du bâton risque de plomber douloureusement les entreprises et, par ricochet, grossir les rangs des chômeurs.