Le Japon condamné à indemniser des victimes sud-coréennes de l’esclavage sexuel pendant la Seconde Guerre mondiale

La Haute Cour de Séoul a ordonné au Japon hier jeudi, près de huit décennies après la fin de la Seconde Guerre mondiale, d’indemniser seize femmes réduites à l’esclavage sexuel dans des maisons de prostitution japonaises. 

Le tribunal sud-coréen a estimé que les victimes avaient été « enlevées de force ou entraînées dans l’esclavage sexuel » et jugé qu’en conséquence, elles avaient subi des « dommages » et « n’avaient pas pu mener une vie normale après la guerre ». Elle a ordonné qu’environ 141.000 euros soient versés à chacune des plaignantes, dont certaines, décédées depuis, sont représentées par leur famille. 

Ce jugement annule la décision d’une juridiction inférieure qui avait débouté, deux ans plus tôt, ces femmes appelées dans un euphémisme « femmes de réconfort », forcées de se prostituer dans les bordels de l’armée impériale nipponne pendant la seconde guerre  mondiale. 

En effet, le 21 avril 2021, un tribunal du district central de Séoul avait mis en avant l’«immunité souveraine» du Japon pour rejeter les demandes d’indemnisation des victimes, arguant qu’y faire droit aurait pu provoquer un incident diplomatique avec le Japon. 

A contrario, la Haute Cour de Séoul a jugé hier jeudi qu’il était « raisonnable de dire que l’immunité souveraine ne devrait pas être respectée en cas de conduite illégale ». 

Cette décision intervient au moment où le gouvernement conservateur sud-coréen du président, Yoon Suk-yeol cherche à enterrer la hache de guerre historique et resserrer les liens avec Tokyo afin que les deux pays puissent faire face ensemble à une Corée du Nord de plus en plus menaçante au plan militaire. 

Selon les historiens, jusqu’à 200 000 femmes, originaires pour la plupart de Corée, mais aussi d’autres pays d’Asie dont la Chine, ont été contraintes de devenir des esclaves sexuelles pour les soldats japonais pendant la Seconde guerre mondiale, une question qui a longtemps pesé sur les relations bilatérales entre Séoul et Tokyo, qui a colonisé la péninsule coréenne entre 1910 et 1945. 

Le gouvernement japonais nie être directement responsable des abus commis pendant la guerre, affirmant que les victimes ont été recrutées par des civils et que les maisons de prostitution militaires étaient exploitées commercialement. Tokyo a toujours refusé de comparaître devant les tribunaux sud-coréens, soutenant que le contentieux avait été apuré par le traité de 1965 qui impliquait le versement de quelque 800 millions de dollars de réparations, sous forme de subventions et de prêts à taux bas.